Enjeux de la santé en République du Congo

Africains | Publié le 8 mars 2017 à 10h06
Les principales pathologies en République du Congo sont dues à des problèmes de santé publique. Telle est la trame de la tribune que nous propose Julio Ossere, enseignant-chercheur en sociologie et management de projets de développement, à la Faculté des Sciences économiques de l’Université Marien Ngouabi de Brazzaville.

Comme dans la presque totalité des Etats africains, les questions de santé sont au cœur des enjeux de développement social et économique en République du Congo. En effet, la situation sanitaire dans cet Etat d’Afrique centrale est telle que les principales pathologies sont des problèmes de santé publique suivant la définition de Baumann et Gao qui considèrent la santé publique comme un « Écart entre un état de santé physique, mental, social constaté, observé, exprimé et un état de santé considéré comme souhaitable, attendu, défini par des références médicales élaborées par des experts, le législateur, etc... ou des normes sociales élaborées par des équipes, la société, etc (1) ».

En tout état de cause, les données épidémiologiques et les informations globales relatives à la situation sanitaire n’y sont guère reluisantes. Cela part de l’état d’émaciation qui est telle que les niveaux de retard de croissance, de perte et insuffisance pondérale chez les enfants de moins de cinq ans en République du Congo sont de 24,4 % (23,7 garçons et 25,1 filles), 5,9 % (5,6 et garçons filles 6.2), 11,6 % (9,9 les filles et les garçons 13,2). En outre, 67 % des enfants de moins de 5 ans (67,3 filles et 66,1 garçons) souffrent d'anémie. Dans les zones urbaines ce taux est de 67,9 % et de 65,1 % en milieu rural.

Système des Nations unies

En ce qui concerne le taux de mortalité des moins de 5 ans, à en croire les données fournies par le Système des Nations unies, il est passé de 117 en 2005 à 68 en 2012 et demeure encore l'un des taux les plus élevés au monde. Environ 17 % des femmes en âge de procréer souffrent de malnutrition, 70 % des femmes enceintes sont carencées en fer et acide folique. Cela pourrait expliquer le fait que le Congo présente un taux de mortalité maternelle de 781 pour 100.000 naissances vivantes.

La malnutrition est causée par plusieurs facteurs notamment l'insécurité alimentaire, la non-diversification de l'alimentation, la pauvreté, l’accès limité aux soins de santé, l’insalubrité, les mauvaises habitudes alimentaires (alimentation inadéquate du nourrisson et du jeune enfant, mauvaises pratiques alimentaires) et les maladies infectieuses.

En 2009, la prévalence nationale du VIH était estimée à 3,2 % (2) (2,4 hommes et 4,1 femmes) ; ONUSIDA estime à 74 000 le nombre de personnes vivant avec le VIH au Congo (2012).  A cela il faudrait ajouter la coïnfection avec le taux d'incidence de la tuberculose de 256/100000 habitants. Brazzaville et Pointe Noire, les deux principales villes du pays, représentent 95 % des cas, principalement en raison de la faible capacité de détection en dehors des villes.

Dans cette cohorte de pathologies, il faudrait également ajouter le paludisme qui est « la première cause de consultation et d’hospitalisation des enfants au Congo où la maladie tue chaque année environ 21.000 enfants de moins de 5 ans (3) ». Autant de problèmes de santé publique et de défis à relever afin d’arrimer développement sanitaire et développement socioéconomique.

Des initiatives pour apporter des réponses à cette situation sont prises çà et là, notamment l’existence des programmes tels que le Plan National de Développement Sanitaire (PNDS) et le Document stratégique de réduction de la pauvreté (DSRP) 2007-2011, le SUN (Scaling Up Nutrition) et REACH (Renewed Efforts Against Child Hunger) auxquels le Gouvernement congolais s’est engagé. Mais ces dernières se limitent généralement à la prise en charge médicamenteuse, la prévention et l’éducation thérapeutique sans inclure et formaliser la communication pour les utilisateurs des services de santé sous forme de stratégie globale.

Meilleure offre de soins

Or, ces programmes censés impacter durablement les conditions de vie des populations, d’une manière générale, et leurs conditions sanitaires en particulier, devraient être appuyés par une approche stratégique de communication se déclinant par axes d’intervention et matérialisée par des activités concrètes. Cela se répercute au niveau opérationnel par l’absence dans les services de santé d’actions et de capacités de communication (humaines, techniques et matérielles) en général et, en particulier, de communication en matière de santé. Ces faiblesses s’agrègent à l’état assez précaire des infrastructures, surtout en milieu rural.

En somme, créer les conditions pour une meilleure offre de soins - en termes de ressources humaines, d’infrastructures, d’équipement, etc. - et l’assortir d’une communication publique vers les usagers en matière de santé publique, c’est-à-dire lui conférer une position stratégique tant à l’échelon stratégique qu’au niveau territorial, pourrait amener le Congo à relever les défis en matière de santé.………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

(1) M. Baumann et M.-M. Gao, Diagnostic de santé d’une population et action humanitaire : un guide pratique, Santé   publique, Vandœuvre-lès-Nancy, France, Société française de santé publique, vol. 11, no 1,‎ mars 1999, p. 63-75

(2) R., Samba, Impact socioéconomique du VIH-Sida et développement durable en République du Congo, in Population, santé et développement au Congo, L’Harmattan, 2014

(3) J.E., Moboula, Impact des dépenses de santé sur le paludisme de l’enfant de moins de cinq ans et la mortalité infanto-juvénile, in Population, santé et développement au Congo, L’Harmattan, 2014

 

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