Singapour ou la plus grande farce de l’histoire diplomatique

Mardi, et donc en l'espace d'une journée, Singapour était la capitale de la diplomatie. C'était la cité de la paix ! Devant les caméras du monde et un décorum garni de drapeaux, le président des Etats-Unis, Donald Trump, et le leader nord-coréen, Kim Jong-Un, ont décidé d'enterrer la hache de guerre. De ne plus s'envoyer de tweets courroucés et guerriers.

Ils ont par le biais d'un document vague proclamé que Pyongyang allait s'engager dans une « dénucléarisation complète de la péninsule coréenne. » Néanmoins, certaines questions restent en suspens : comment tout cela va-t-il se passer ? Quels mécanismes de contrôle la Corée du Nord compte-t-elle mettre en place pour que cette dénucléarisation annoncée soit réelle, totale et vérifiable ? Quels sont les gages ?

En tout cas, Trump, lui, se veut rassurant : « Cette rencontre prouve qu’un réel changement est possible. Ma rencontre avec Kim Jong-Un a été honnête, directe et productive. »  S'il le dit... Mais qu'il nous soit permis d'en douter. Car ces retrouvailles singapouriennes bon enfant, historiques par ailleurs, risquent de devenir la plus grande farce de l'histoire des relations internationales. Une mise en scène au service des ego.

De toute évidence, Kim Jong-Un est en quête de légitimité mondiale. Lui, le banni, l'infréquentable, veut désormais être invité à la table des démocraties. Alors que dans ses geôles continuent de crever tant de personnes, une cohorte de militants des droits humains. En Corée du Nord, la liberté n'est pas chez elle. Elle y est enfermée, bafouée, muselée, oppressée.

« Trump a sacrifié à Singapour et l’honneur des Etats-Unis et la vie du peuple nord-coréen »

C'est pourquoi nous devons entendre ce clairvoyant avertissement de l'essayiste Guy Sorman, publié dans journal Le Monde : « La rencontre entre Donald Trump et Kim Jong-Un s’inscrira dans l’histoire parmi les pages les plus sinistres de l’empire américain. Singapour 2018, Munich 1938 : comment ne pas comparer ces deux infamies ? A Munich, les gouvernements britannique et français abandonnèrent les Sudètes à Adolf Hitler, espérant, par leur lâcheté et leur incompréhension de l’adversaire, acheter la paix. Il revint à Winston Churchill de déclarer alors : « Ils ont sacrifié leur honneur pour éviter la guerre ; ils auront le déshonneur et la guerre. »  

« Trump, pareillement – mais il ne le sait pas –, a sacrifié à Singapour et l’honneur des Etats-Unis et la vie du peuple nord-coréen, tenu en esclavage par l’un des régimes les plus fous de la planète. »